DN MADe Numérique 1

La nature de ce projet pédagogique est de faire l’expérience de l’École du non-savoir en s’appuyant sur le texte Le maître ignorant de Rancière. Quelle est la lecture politique qu’on peut faire de cet “anti-magistère” de Jacotot, qui ne se fatiguait pas de répéter qu’il n’avait rien (aucun “contenu” spécial) à apprendre à ses élèves ? La possibilité d’émancipation dans l’acte d’enseigner est liée, pour Jacotot, à la potentialité d’un triple questionnement, qui est un appel libertaire dirigé vers l’intelligence et un impératif racal adressé à la volonté. Le maître ne cesse de demander : « et toi ? Qu’est-ce que tu vois ? Qu’est-ce que tu en penses ? ». Il s’agissait dans cette collaboration avec les plus jeunes étudiants de l’école Estienne de les amener à regarder l’événement de l’École du non-savoir avec l’innocence des débutants. Le projet proposé à la classe de première année en DN MADE numérique a permis aux étudiants de s’engager vers des voies qu’ils n’auraient habituellement pas empruntées.

Les jours durant, le projet avançait, et les réflexions autour des différentes thématiques envisagées ne faisaient que de se déployer, s’enchérir et de se concrétiser. Œuvrer et discuter avec un designer, Ruedi Baur en l’occurrence, était une opportunité pour cette classe afin d’avoir un premier regard sur la profession vers laquelle ils se dirigent. En premier temps, il a fallu effectuer une introspection afin de sélectionner un thème sur lequel réfléchir. La pluralité des idées issues de ce petit groupe se retranscrit dans le fait qu’ils aient trouvé une écriture propre à eux. Le fait d’être exposé au sein d’un musée a permis à cette classe de mettre en lumière des sujets sensibles, honteux, de parler de sujets qui leur tiennent à cœur, ou sur lesquels ils voudraient que les gens gardent un œil attentif. Ce travail a permis à beaucoup de se positionner en tant que designer, graphiste ou illustrateur, ayant une deadline et des attentes, cela amenait à des responsabilités. Les étudiants ont dû apprendre à synthétiser, à aller à l’essentiel dans un but souvent narratif dans l’exercice didactique qu’était ce projet. Il était nécessaire d’apprendre à communiquer des idées le plus simplement possible et de manière intelligible. Beaucoup se sont confrontés pour la première fois au dessin numérique, apprenant à user de Photoshop et surtout Illustrator. Ce projet était aussi enrichissant pour les étudiants que cela le sera pour les spectateurs du musée, en réalisant ces affiches ils ont appris de nouvelles choses grâce à de nombreuses recherches. Au final il s’agit d’un réel échange entre Ruedi Baur, les enseignants, les étudiants et les spectateurs. Certains sujets choisis sont plus légers que les autres, cela permet de faire respirer l’exposition, qui sera composée d’une grande diversité de thèmes. À côté, quelques thèmes parlent de choses très peu traitées dans les médias, tentant de sensibiliser à des problématiques auxquelles on est tous confrontés, concernés, ou du moins l’étudiant et ses proches. Bien que quelques doutes se soient parfois dispersés au sein des pensées de la classe, les rencontres avec Ruedi Baur et les professeurs ont amené à une réelle compréhension du projet, des attentes et de leur propre sujet. Ce fut un travail inspirant, motivant et passionnant.

Enseignants : Éric Boisseau & Patrick Pleutin

DSAA d’illustration scientifique

Comment se saisir d’un sujet scientifique complexe, aux multiples enjeux, lorsque l’on est étudiant en design d’illustration ? Comment se placer face à un partenaire scientifique spécialiste d’un domaine, lorsque l’on est soi-même non-sachant, et comment comprendre son message et ses besoins ? Voilà les questions que se sont posées les étudiants de DSAA DIS 2 e année, questions qu’ils ont tenté de formuler sous la forme d’une bande-dessinée. Cette réflexion graphique et narrative joue le rôle d’un teaser, inaugurant la recherche conceptuelle et esthétique à venir. La formation en design d’illustration scientifique, nous amène, étudiants, à travailler avec des acteurs du monde de la science. Ainsi, nous devenons un point de rencontre, de dialogue entre la sphère scientifique et le public. En qualité de lien, nous sommes confrontés à des enjeux de médiation et de vulgarisation, afin de rendre le savoir accessible au plus grand nombre, via l’illustration. En deuxième année, ces considérations sont d’autant plus réelles que chacun d’entre nous élabore son projet de diplôme, en partenariat avec un spécialiste d’un domaine scientifique. Celui-ci a pour but de nous placer en tant qu’auteurs face à un besoin réel de communication face à un public. Cette courte bande dessinée s’inscrit dans cette démarche comme «teaser», posant les premiers jalons des réflexions discursives et plastiques pour la suite du projet de diplôme. Le dessin comme langage devient un médium de prédilection, d’une part avec sa variété des systèmes d’écritures (didactique, narratif, contemplatif,…), d’autre part via la diversité des techniques qu’il propose (numérique, traditionnel, hybride,…). L’illustration permet d’introduire des méthodes de recherche et d’expérimentations à rebours des traditions scientifiques, et de questionner ainsi la façon dont le savoir est produit. Au-delà des faits scientifiques et du savoir académique, c’est la question de sensations que peut procurer le domaine en question, qui devient importante (sentiment d’infini, de vertige, de multitude, de perte, de grouillement,…) Le choix du format de la bande dessinée, par sa dimension temporelle et narrative, pose le dessin comme cheminement de la pensée, accompagnant le lecteur dans sa découverte du sujet présenté. Non seulement elle vulgarise des données scientifiques, mais sa fonction première est aussi d’éveiller la curiosité et l’intérêt. En outre, l’adoption de tons variés (humoristiques, épiques, dramatiques,…), rend plus accessible des sujets qui semblent parfois abscons. Les possibilités structurelles de ce format permettent également d’introduire les questions de représentation de l’infiniment grand, de l’infiniment petit, du tabou, de l’irreprésentable, des systèmes complexes… Le basculement de la bande dessinée dans le cadre de l’affiche pour l’école du non savoir lui confère une tout autre dimension : bien plus visible, elle devient contemplative. Son changement de format provoque une confrontation, un corps à corps avec le public, engageant un dialogue physique avec ce-dernier, alors capable d’embrasser la connaissance.

Enseignants : Annaick Peron, Matthieu Lambert, Patrick Pleutin

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